jeudi 23 juillet 2009

En attendant d'autres aventures...

Voici venu le temps des vacances. Ce blog va s'endormir au soleil quelques semaines. Je vous promets bientôt des critiques de "Breaking Bad 2", "30 Rock 3", "Glee" mais aussi la suite de mes séries de rêves, quelques billets d'humeur sur les meilleurs génériques de l'histoire de la télévision et puis aussi quelques anecdotes venu des coulisses de la télévision où j'officie en tant que modeste auteur. Ajoutez à cela quelques chapitres des aventures d'un french auteur à Hollywood et vous aurez le programme de rentrée de "Et vous voyez ça pour quelle chaîne".

En attendant, écoutez-moi en compagnie de mon compère Benoît "Dr Green" Lagane tout le mois d'Août sur l'antenne de France-Culture. ça commence le Lundi 27 juillet 2009 et c'est à 19h tous les jours de semaine dans une émission intitulée Série télé : le monde en 25 épisodes (référence à notre émission de l'an passé (disponible à cette adresse : http://www.heraut.eu/fculture/).

A très vite. Bonjour chez vous !

lundi 6 juillet 2009

Série de rêve (4) - Veronica Mars




Autre candidate au petit club des séries de rêve, « Veronica Mars », show multi-facettes malin et graphique bien dans l’air du temps des mid-2000. Je mets en ligne les trois papiers (d’époque) que j’avais écris pour www.series-etc.com. J’envie les gens qui n’ont encore rien vu.



Mars, Veronica Mars.
Dotée dès son pilote d'une ambiance et d'un style que bien peu de séries peuvent se targuer de posséder au bout de plusieurs saisons, "Veronica Mars" joue les grandes en adoptant la figure de production à la mode : le feuilletonnant à suspens. Un casting de premier ordre un producteur poids lourd et surtout une bonne histoire qui se boucle en fin de première saison : c'est Veronica Mars.

La meilleure série de 2005 n'est pas "Lost" ou "Desperate Housewives", et Dieu sait que, pour différentes raisons, on les apprécie ces deux-là ! Non, la meilleure série de l'année est emmenée par un petit bout de femme. Une "adulescente" au nez retroussé au look branché cool et à l'audace communicative. "Veronica Mars" commence comme un teen-show, avec quelques épisodes un poil mous du genou, avouons-le, pour finalement dévoiler les atours d'une grande série. Personnages complexes, casting racé, guest stars jouissifs, coups de théâtre millimètrés et réalisation haut de gamme. Normal, quand à la baguette de producteur, on trouve Joel Silver -l'homme qui produit les blockbusters par trilogie, (ça va plus vite), "Lethal Weapon", "Die Hard" et "Matrix"- on ne s'attend pas à voir débarquer un épisode de Santa-Barbara ! Veronica Mars surfe sur la vague des séries dites de « rendez-vous ». Grâce à plusieurs intrigues sous-jacentes très fortes, le meurtre de sa meilleure copine, la disparition de sa mère et le quasi-viol dont Veronica, elle-même, est victime lors de sa première expérience sexuelle, la série tisse un climat à la fois malsain mais aussi tendu avec une héroïne très forte, quasiment une super-héroïne, à qui rien (ou presque) ne peut arriver. "Veronica Mars" fonctionne à merveille parce qu'elle joue avec l'ingrédient à la mode : être une série au genre indéfinissable, jouer sur différents tableaux, avec une palette de genres efficaces. "Veronica Mars" mime donc avec bonheur les codes des séries de lycées (high-school show) pour mieux jouer avec les éléments du film noir et du thriller. Le PI, Private Investigator, figure archi-traitée dans les séries US bénéficie du côté de Neptune, ville des milliardaires à quelques encablures de San Diego, d'un traitement décomplexé, presque relu. Un peu comme l'avait fait "Magnum" dans les années 80. On peut être un détective privé et avoir des faiblesses, se tromper ( les moustaches et les chemises hawaïennes en moins). Veronica et son père mènent des enquêtes parfois ensemble, parfois séparément. Et bien sûr, au-delà de l'enquête du jour, chacun à son tour nous montre qu'il ne s'est pas résigné. Le meurtrier de Lily Kane doit tomber. La série utilise deux outils de narration, somme toute classiques, mais avec une efficacité avérée. La voix-off, distanciée, à la "Sex and the city" et des flash-back joliment réalisé et toujours signifiants. Rob Thomas, le créateur de la série prend un malin plaisir à brouiller les pistes en nous jetant dans les pattes, une dizaine de coupables potentiels. Des personnages bien sentis avec des trajectoires plutôt surprenantes. La série n'évite pas, comme toute fiction avec un rythme narratif aussi risqué, quelques épisodes un peu plus faibles (voir guide). L'ensemble reste d'une qualité très haut de gamme. Une bande-son indé efficace sortis des college chart (The Dandy Warhols, Spoon, Ivy, The Format) [www.veronicamarsmusic.com] vient soutenir une réalisation, présente mais pas trop, une mise en image colorée qui joue le jeu du mystère mais aussi de la sensualité sea sex and sun. "Veronica Mars" joue le jeu d'une écriture entièrement basée sur les ressorts de la surprise et du dérangement du spectateur.
La première saison est relativement équilibrée avec un gros point fort pour les cinq derniers épisodes de la saison où le puzzle déconstruit par Rob Thomas en début de saison se met patiemment en place. Le "final" est un des meilleurs épisodes de conclusion de ces dernières saisons. Exit le teen-show, place au slasher avec poursuite, voiture qui tombe en rade dans les bois déserts et nocturnes. Et un tueur qui rôde...
"Veronica Mars" est le type de série à laquelle on s'accroche grâce à un paquets de petits on-ne-sait-quoi. Et même si l'audience n'est toujours pas au rendez-vous (et ce, malgré des rediffusions estivales sur la chaîne n°1 CBS), la série est en train de bâtir son petit bout de notoriété grâce à des qualités artistiques patentes et au charisme d'un casting emmené par la pétillante Kirsten Bell qu'on aurait aimé avoir comme copine au bahut, pétillante et convaincante à souhait pas comme Stéphanie machin de la seconde E ! L'autre force côté comédien, ce sont les rôles dévolus aux adultes. Généralement, dans les teen series, les parents sont toujours parqués dans un périmètre assez convenu. Ici, les adultes, vivent, ils ont eu des liaisons, des blessures, ils cachent des mystères, de sombres desseins, marque de fabrique de la série toute entière. Que se soit Harry Hamlin, en acteur hollywoodien sur le retour, Kyle Secor, en Bill Gates sexy, la galerie de personnages fonctionne avec une rare efficacité. On ne vous parle même pas des arrivées de Charisma Carpenter en ex-Lakers girls nymphomane et Allyson Hannigan en fille à papa complétement barrée. Ce sont tous les petits détails qui viennent s'agréger autour du personnage réussi de Veronica et de sa bande de potes qui font de "Veronica Mars" une série différente. Celle qu'il faut regarder. Après cela, ne dites pas, qu'on ne vous a pas prévenu.




Veronica Mars 2 : Un cran au dessus
C'est pour nous la fiction la plus aboutie du moment avec quelques séries médicales ("Grey's...", "Dr House"). Conduite de l'intrigue, qualité des personnages principaux comme secondaires, utilisation du second degré, choix des thèmes, haut niveau artistique. "Veronica..." est tout simplement un cran au dessus.

Quand le site officiel de « Veronica Mars » affichait cette phrase de Joss Whedon (créateur de Buffy et Angel) : « Veronica Mars, la meilleure série de tous les temps », il n'était peut-être pas loin de la vérité. Certes, il manque quelques atouts (notamment appartenir à une catégorie un peu plus convenable que « High-school slasher ») à la création de Rob Thomas et Joel Silver pour prétendre réellement à ce titre que personnellement je garde pour Les Sopranos. Mais quand on voit de quelle main de maître cette « petite » série a réussi à se construire un univers propre et aussi marqué, on ne peut être qu'admiratif. Tenante de l'ultra-feuilletonnant (les fameux serialized shows, « Veronica… » comme « Lost », « Veronica Mars » se permet des choses insensées, en terme de relance d'intrigues et de coups de théâtre, avec une différence de taille : elle réussit à retomber sur ses pattes sans inventer de nouveaux mystères qui ne déboucheront pas sur de nouvelles interrogations insensées. « Veronica Mars » saison 2 comme sa devancière offre une intrigue bouclée pour livrer un divertissement de haut vol. Un signe : même quand les intrigues sont un peu faibles (milieu de saison), les choix artistiques (mise en scène, bande-son, design), ainsi que la formidable ambiance – atmosphère très lourde qui règne à Neptune malgré (ou à cause) le soleil de plomb- sont là pour rattraper le coup. Et pour être sombre, elle est sombre cette nouvelle saison (disparition de personnages principaux, allusions aux MST, au viol, à la drogue, à la pédophilie…). Pari supplémentaire de la part des auteurs qui misent désormais sur un véritable personnage de film noir. Certes, Veronica (toujours aussi bien incarnée par Kristen Bell) est la gentille, certes elle triomphe toujours à la fin mais que de péripéties pour en arriver là. La super-héroïne de la première saison a perdu son insouciance et approche dangereusement du gotha des personnages dont les grands choix consistent en la moins pire des deux solutions foireuses. Une situation que l'on retrouve habituellement sur le câble dans les séries de HBO ou de FX. Cette saison, les intrigues parallèles se sont multipliées (un peu trop peut-être) pour nous offrir un festival de rebondissements, de cliffhanger comme seul… Lost sait aujourd'hui en délivrer mais avec infiniment moins de tact. Artistiquement, rien ne fait peur à Rob Thomas le magicien, le gars ne se défend pas mal non plus quand il s'agit de faire passer des piques, des vannes ou des insultes. L'une des grandes forces de la série réside dans la puissance de son casting. Si c'était une équipe de basket, on dirait qu'elle a du banc. Les seconds-rôles qui entourent Veronica ont livré de grosses performances, notamment le duo Weevil-Logan. Les frères Casablancas (Dick et « Beaver » ne sont pas mal non plus. Le sheriff Lamb nous fait un grand numéro. Crétin de première, on ne sait plus trop quoi penser de lui quand il se décide à écouter enfin Veronica et son père. Les guest de Charisma Carpenter en belle-mère ex-Cheerleader nympho, et le maire (dérangeant Steve Gutemberg) et sa barge de fille viennent parachever l'édifice. Quel équipe ! Côté plume maintenant, pas besoin d'être expert en fiction télévisée pour voir qu'il y a de la passion dans tout ça, les scénaristes prennent un pied évident à nous torturer avec apparitions de personnages improbables, ces trahisons qui n'en peut-être pas sont pas, enfin pas vraiment. Les mensonges, les manigances, les coups de théâtre. Le bouquet final de ce feu d'artifice de 22 épisodes est des plus réussis, sans rien raconter, on peut dire que Rob Thomas nous adresse une vraie leçon d'écriture télévisuelle dans laquelle il sort des traditionnels marquages narratifs des séries de 52 minutes. Malin comme un singe, il se permet tout, délocaliser la série géographiquement ou dans le temps ou dans des mondes parallèles. Comme à l'issue de la saison passée, quand le boss est aux manettes, le rythme s'accélère et la fin se déroule dans une ambiance irrespirable où les mystères tombent comme des mouches (et comme les personnages d'ailleurs !).
Au final, "Veronica Mars" s'en va vers sa nouvelle vie à la fac sans nous dire au revoir. Normal, on la retrouve juste après dans le premier épisode de la troisième saison. Trop fort ce Rob. Alors « Veronica Mars : the best TV show ever ? » Pas le pire en tout cas.



Veronica Mars 3 : même les meilleures choses ont une fin
Moins clinquante et moins rythmée (dès son nouveau générique d’ailleurs) que lors de ses saisons précédentes, « Veronica Mars » tire sa révérence sur quelques épisodes amères et réussis. Le compteur s'arrête là. Bye, bye Veronica !

Finir une série n'est pas une mince affaire. Beaucoup s'y sont cassés les dents. Rob Thomas, le créateur et showrunner de « Veronica Mars » avait eu, lui, le temps d'y penser. Sa série débutait à peine sur l'antenne de la défunte UPN en 2003 que des rumeurs d'annulation courraient déjà. Certains acteurs du casting principal avaient été remis sur le marché par leur agent, signe peu encourageant pour la série alors. La suite avait contredit la rumeur et « Veronica Mars », sans casser la baraque, avait démontrer qu'elle avait sa place artistiquement parlant dans ce monde de brute qu'est le prime-time américain. La série a ensuite passé le cut de la première saison puis de la seconde en enchaînant les tours de force. Photographie sexy, bandes-son inégalable, épisodes à structure, twist malin ou dantesque, guest-stars de standing, « Veronica Mars » restera dans l'histoire de la fiction télé des années 2000. Pour tout ce que l'on a déjà dit sur cette série sur ce type (voire précédentes saisons) . Son côté sucré-rock, ses personnages clichés assumés ou archétypes singuliers et toujours bien trouvés. Cette saison 3 a déçu nombre des aficionados de la série. Ce n'est pourtant pas une catastrophe. loin de là. Le nouveau générique (plus stylé) mais étrangement rythmé laissait entrevoir une rupture dans la conduite de cette série inclassable. Contrairement aux saisons précédentes à l'intérieur desquelles s'articulait une intrigue au long cours à chaque fois résolue, de main de maître (surtout la première) cette saison se présentait avec des intrigues plus courtes (et donc a priori plus difficilement convaincantes). La série a effectivement changé mais elle a gagné en gravité. Veronica (toujours impeccable Kirsten Bell) gagne en complexité. Elle est à la fois plus vulnérable, amoureuse, tout en gardant son esprit rebelle et cet éclair de folie qui peut lui permettre de faire n'importe quoi sur un coup de tête (et ça, c'est très jouissif). Veronica a des rêves, travailler au FBI, elle laisse les cons et les médisants de côté. Une grande leçon de vie et de façon d'être pour une jeunesse dorée qui ne passe son qu'à faire la fête (Logan et consorts). Ce n'est un secret pour personne que de dire que « Veronica Mars » n'a jamais trouvé son public. Malgré son aspect réussi de mystery show hype, malgré sa façon de n'être ni une série ado, ni une bluette, la série de Rob Thomas est restée coincée dans les limbes de l'audience. L'image branchée de la série a supporté un temps cet état de fait mais les chiffres restant les chiffres, les dirigeants de CW ont du prendre des décisions. Une annulation restait gérable. Le problème, et ce n'est pas la première fois que ça arrive, c'est que VM n'aura pas eu le temps nécessaire pour tirer correctement sa révérence. En effet, on ne peut pas imaginer que Thomas aie fait revenir, Leo (ancien adjoint et flirt de Veronica), Van Lowe (némesis de Keith) ou encore Jake Cane pour boucler sa série comme il l'a fait là. En même temps, ce qu'il y a de bien avec les meilleurs, c'est qu'ils font des trucs impeccables avec trois fois rien. Le dernier épisode, écrit par Rob Thomas, retrouve la veine tendue des meilleures épisodes des saisons 1 et 2. De manière plus globale, il y a eu une spirale indescriptible dans le dernier tiers de saison 3, les choses se sont empilées et se sont précipitées, la vie nous réserve des tours parfois pendables. La mort du sheriff Lamb, le crétin qu'on adorait détester en est certainement le symbole le plus voyant. Les ennuis judiciaires de la famille Mars viennent parachever cet étrange virage vers quelque chose de plus désespéré. Comme si Super Veronica n'allait pas pouvoir retomber une fois encore sur ses jambes. Notre héroïne préférée a les honneurs du dernier plan. Après avoir voté avec un étrange sourire aux lèvres, Veronica part se perdre dans une rue d'un Neptune devenu bien trop petit pour elle. Il pleut pour la première fois de la série ou presque. L'adolescence est finie. Bienvenue dans la vie adulte Veronica.