Et vous voyez ça pour quelle chaîne ?
L'écriture télé vue de l'intérieur.
mardi 14 janvier 2014
HBO, encore et toujours
Oui, je sais. HBO n'est plus cette chaîne des années 90 qui incarnait à elle seule le potentiel des séries US à venir. Depuis, il y a eu Showtime (Californication, Weeds, Dexter), FX (The Shield) AMC (Breaking Bad, Mad Men), Starz (Boss), Netflix (House of cards), Comedy Central, MTV, A&E, PBS, TNT, USA Network, j'en passe et des meilleures. Les "guichets" pour placer une série aujourd'hui au Etats-Unis sont innombrables. Mais HBO reste le diffuseur mythique. Game of thrones est à peu près ce qui se fait de mieux aujourd'hui en télévision. Girls, est branché au possible. Plus que les autres, HBO a constamment su se réinventer en évitant de fabriquer des séries en batterie (un comble). Résultat, la chaîne à péage dépense sans compter pour attirer des talents atypiques dans les fictions maisons. La preuve avec True Detective, petit bijou de polar dont le pilote vend pourtant assez mal l'ambition. Impeccable graphiquement, True Detective réalise une sorte de grand chelem en ne présentant aucun défaut. Ecrite par Nic Pizzolato, Prix du Premier Roman étranger de l’Académie Française en 2011 avec Galveston (Belfond) la série (enfin l'anthologie mais on se comprend...) permet à Woody Harrelson et Matthew McConaughey d'exploser à l'écran dans cette histoire poisseuse, mêlant ésotérisme, vieux sud religieux, vieilles blessures et serial killer. Un grand numéro d'acteur. Une mini-série (une intrigue sur huit épisodes et pas sur 500, youpi !) ambitieuse mais cohérente. HBO a encore tapé juste.
Tout ça me plaît au plus haut point.
dimanche 5 janvier 2014
Bye Walter…
Ça y est. Une de plus.
J’ai fini par regarder le dernier paquet d’épisodes bouclant Breaking Bad et j’ai visionné le serie finale un drôle de sentiment en tête. Drôle parce qu’il y avait plus de soulagement que de déception. Au final, après quelques épisodes – quand même un poil décevants - Vince Gilligan et sa bande retombent plutôt bien sur leurs pattes.
Certainement que tout ça serait mieux passé en enchaînant les deux parties de la dernière saison.Peut-être aussi que le nombre d'épisodes, au vu des directions prises, étaient trop important. Sentiment mitigé donc mais respect total tout de même.
Comme d’habitude avec la fin d’une grande série, pas facile de tirer un trait sur un univers qui nous accompagne depuis des années (avantage de ne pas tout regarder en un week-end…). BB possède-t-elle une fin à la hauteur de la série elle-même ? Difficile à dire avec la noirceur qui caractérise cette dernière livraison d’épisodes ou encore au jeu et la trajectoire parfois monocorde de certains personnage (Jesse, Skyler…). Bref, cette dernière soirée n’était pas chargée par l’émotion que j’ai pu ressentir à l’occasion de la fin des Sopranos, de Six feet under, Veronica Mars, Friday Night Lights, The Wire ou encore de d’Urgences et de Friends. Non, plutôt quelque chose du côté de la délivrance comme avec The Shield. Mais il fallait quand même finir le travail, alors ça a été fait et de belle manière.
Qu’on aime ou pas la série, son fond de commerce, son message (j’y reviendrai) difficile pour un scénariste de ne pas être fasciné par le rollercoaster émotionnel, dramaturgique et même ludique mis au point par Vince Gilligan durant les six saisons qu’a duré Breaking Bad. Dès le départ, les créateurs annonçaient que ça finirait mal. Ils ont tenu parole, évitant d’emblée la facilité – en tout cas aujourd’hui où tout aurait été possible à une série comme Breaking Bad - d’une fin ouverte ou amorale.
Car le message de la série est clair. En télévision au moins, le crime ne paie pas. Les seuls à s’en sortir ne vendent pas de drogue mais oublient leur ami et ancien associé (Walter White est à l’origine de Grey Matters, société qui les a rendu multi-milliardaires). A ce propos, j’étais content de retrouver cette partie de l’univers de Walter White (son passé avant la « déchéance » de l’enseignement de la chimie. Pour tout dire, au début de la série, j’ai même cru qu’une partie de l’intrigue concernerait la backstory de Walter durant ses années de chercheurs à Los Alamos (berceau de la technologie nucléaire américaine…). Il n’en fût rien. La série s’est enfoncée dans la noirceur et la folie furieuse condamnée à trouver des méchants toujours plus méchants. Pour que Walter White aie encore quelque chose à défendre et nous apparaisse humain encore un tout petit peu…
Un peu de déception pour ce dernier épisode mais quelques grands souvenirs quand même à propos de Breaking Bad. La délicieuse ironie dramatique des premières saisons. Le jeu entre Walter et Hank. Les mensonges (les moins cyniques en tout cas). Les expressions de Jesse (avant qu’il ne tombe dans l’atonie des dernières saisons – jeu déjà éteint). Les flash-backs dans un Ouest américain écrasé par le soleil. La fusillade entre Hank et deux tueurs pas commodes. Gus Fring et son impeccable retenue...
Si c’est à l’empreinte qu’elle laisse, à une de ses scènes dont on s’inspirera dans ses écrits, que l’on repère une grande série, alors Breaking Bad en est une à coup sûr.
vendredi 29 novembre 2013
Enfin une "french touch" des séries...
Un international Emmy pour "Les revenants", une manifestation (Direct to series) faisant la promotion des fictions françaises à L.A où les formats "made in france" ont la côte (Candice Renoir, Les revenants, Braquo en passe d'être adaptés), des papiers enthousiasmants sur le potentiel international de la vision française dans les séries (succès d' "Engrenages" ou de "Fais pas çi, fais pas ça" traités dans Variety ou les excellentes pages télé du New-York Times), on ne peut pas nier qu'on vit depuis quelques mois une jolie embellie du côté de la réputation des fictions télé française à l'étranger.
Cela dit, il ne faut pas occulter que tout cela ne représente qu'un arbre qui cache la forêt d'une multitudes de freins (culturels, industriels, personnels...) qui limitent encore le nombre de bonnes séries. Personnellement, j'essaie toujours de voir la bouteille à moitié pleine et à moitié vide tout en pariant sur le fait que les nouvelles générations de décideurs savent où est leur intérêt. Les choses bougent, il faut être aveugle pour ne pas s'en apercevoir. Mais elles bougent lentement, comme la fiction d'un pays de 64 millions d'habitants où les habitudes de consommation sont encore très fortes. Il faut se remettre en cause (scénaristes compris bien évidemment) pour essayer de tendre vers un système, sinon parfait, qui accueille et respecte la vision de l'auteur et donne des moyens à ceux qui produisent de valoriser les oeuvres en terme de production bien sûr mais aussi en terme de programmation ou encore de visibilités sur les marchés internationaux.
vendredi 21 juin 2013
Tony for ever
La nouvelle est tombée au réveil. Un SMS, deux alertes Variety, une brève sur France-Info. N'en jetez plus, c'est sûr, il est arrivé quelque chose de grave. James Gandolfini est mort à 51 ans.
Je répète assez souvent ici ou là que « Les Soprano » n'est pas juste la meilleure série de tous les temps, c'est une expérience unique. Tout ça grâce à un homme en particulier : James Gandolfini, alias Tony Soprano. David Chase, le cerveau et génie qui se cache derrière le chef d'oeuvre d'HBO sera d'accord pour dire que sans le quintal bien sonné de son acteur vedette, cette série aurait été moins. Moins grande, moins tragique, moins réelle, moins identifiante, moins tout, quoi !
Le coup de génie de Chase et d'HBO aura été d'incarner son capo mafieux en quelqu'un d'à la fois attirant et vulgaire. Rien ne sera épargné à ce pauvre Tony en matière de costumes ou de situations scabreuses. Mais Gandolfini passait outre. Il acceptait les peignoirs pour mieux briller quand, au détour d'une cérémonie de remise de prix, il enfilait un smoking tout noir et paraissait enfin puissant et serein.
J'ai eu la chance de croiser James Gandolfini deux fois dans ma vie de journaliste télé. Quand HBO, Warner et Les Soprano débarquaient à Paris, c'était certainement lui le plus discret de la bande. Là, où Dominic Chianese faisait le show, que David Chase remballait les journalistes ou que Lorraine Bracco nous présentait sa charmante fille après être arrivé avec 45 minutes de retard pour cause de shopping, Gandolfini faisait son métier avec simplicité et professionnalisme. Sa carrure m'avait impressionné. Les couloirs du Ritz étaient trop petits pour les épaules de T. Le voir sourire tristement ou bien prendre quelques secondes pour réfléchir à sa réponse me donnait la chair de poule. Rarement un acteur n’aura fait autant corps avec son personnage.
Je n'ai jamais eu pour habitude de me faire prendre en photo avec des gens que j'interviewais. Dans le cas de James Gandolfini, j'avoue que je regrette.
So long, T.
mardi 30 avril 2013
Une passion très passionnante
Si comme moi, début 2000, vous avez été un amoureux du New Jersey, des « protections » commerçantes et des danseuses à gros lolos, difficile de ne pas avoir un frisson qui vous parcourt l’échine quand Emmanuel Burdeau revient brièvement et sans emphase sur la dernière image de la série The Sopranos. Une fin tout juste possible. Un écran noir. Ainsi se finissait ce qui reste aujourd’hui comme la plus grande série de tous les temps. Il faudrait bien plus d’un ouvrage pour aborder la complexité de l’œuvre de David Chase. Et pourtant avec ses 97 pages, Burdeau raconte l’essentiel. Dans un style de haut vol mais accessible,, traduisez qui évite la pédanterie de certains critiques parisiens, il convoque tout ce qui a fait le succès de la série d’HBO au tournant des années 2000 et nous parle de la série en alternant propos généraux liés au contexte sociologique ou détail d’un dialogue d’une scène. Rien n’est exhaustif mais plutôt bien renseigné. Pas de guide des épisodes. Pas de listes des musiques – pourtant géniales – qui peupleront le générique de fin pendant 86 épisodes et autant d’heures que compte la série, pas d’arbres généalogiques de la famille Sopranos. Burdeau n’est pas là pour faire de la page. Au contraire. Il signe un livre très beau. Compact et souple. Un livre à glisser dans un sac à dos ou à déposer sur son bureau. Emmanuel Burdeau inaugure là, un type de livre qu’on aimerait voir plus souvent s’agissant des séries télé. Plus essai que guide de fan, cette passion est aussi une voie médiane entre ceux qui veulent voir les séries prendre le dessus ( ?) sur l’éternel cinématographe et ceux (y en a-t-il encore ?) qui ne veulent pas voir que le récit sériel s’est créé une mythologie ces dernières décennies. Rien que pour le passage où l’auteur imagine David Chase tentant d’expliquer aux acteurs qu’il supprime leurs personnages de la série, ce livre vaut le coup.
Emmanuel Burdeau. La passion de Tony Soprano. Editions Capricci. Paris. 2010. 97p.
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